Analphabétisme à Souk Ahras

Des chiffres effarants



Selon l’Office national d’alphabétisation et de l’enseignement d’adultes (ONAEA), la wilaya de Souk Ahras compte 107 000 analphabètes, soit un tiers de la population. L’enclavement et le relief accidenté de quelques régions de la partie nord, notamment l’éloignement des écoles, des défaillances dans le ramassage scolaire constatées dans les communes de la bande frontalière et la réticence des parents quant à la scolarisation des filles en milieu rural sont autant de facteurs qui favorisent ce phénomène que l’on croyait réduit à l’orée de la décennie de l’Internet et de la vertigineuse avancée des moyens de communication. L’illétrisme à Souk Ahras est également expliqué par le chômage endémique et une paupérisation qui affecte les deux tiers de la population. Des pans entiers de la société se trouvent à Souk Ahras en « disette chronique », sinon réduits à la mendicité. A 12 ans, Yasmina qui vit depuis sa naissance dans un hameau distant de 7 km de la commune de Hedada ne sait pas encore lire et écrire, et pour cause, ses parents ont jugé hasardeux son va-et-vient quotidien vers l’école sans accompagnateur. Rabah, un quinquagénaire qui habite un quartier populaire de la périphérie, estime que « le temps est plutôt à la débrouille et que les études sont en passe d’être réservées aux nantis ». Réflexion extrême motivée par une situation sociale déplorable et des relents de regrets pour avoir privé ses quatre enfants d’études. Même si le phénomène persiste à Souk Ahras, les efforts déployés par l’ONAEA et le concours des autres partenaires, entre autres la direction de l’emploi et celle de l’éducation, sont susceptibles de réduire ce taux de personnes illettrées, jugé excessivement élevé. Selon Zeghdani Khemissi, directeur d’annexe de l’office, les chiffres confirment une évolution certaine dans la prise en charge de cette frange de la société. Ainsi, au lieu de 314 scolarisés en 2003, l’annexe compte 6168 inscrits pour la rentrée 2006, dont 972 élèves de sexe masculin et 5196 de sexe féminin. Un engouement que le même responsable explique par une campagne de sensibilisation qui a atteint les endroits les plus éloignés de la wilaya, la qualité des encadreurs et les moyens mis à la disposition de l’annexe. « Des résultats encourageants ont été réalisés en matière de lutte contre l’analphabétisme », a annoncé le directeur qui a tenu à arguer par la même occasion que « le problème se pose par rapport à un pays qui veut s’inscrire dans le concert des nations développées. Les efforts consentis par l’Etat ont permis à l’office d’occuper la dixième place en matière d’alphabétisation au lieu de la 21e à l’échelle nationale en 2003. » S’agissant de l’encadrement, l’ONAEA compte 324 animateurs, dont 258 universitaires recrutés dans le cadre du pré-emploi, du filet social ou de l’emploi de jeunes. En sus des objectifs pédagogiques qui lui sont assignés, l’annexe de Souk Ahras affiche d’autres intentions, à savoir la création d’un pôle éducatif pourvoyeur de postes d’emploi et l’implication d’autres partenaires dans la lutte contre l’illétrisme, phénomène qui semble avoir la peau dure à Souk Ahras.

                                                                                                                                                                                                                                         A. Djafri  El Watan